Le biais de négativité, un héritage encombrant de nos ancêtres chasseurs-cueilleurs
De notre tendance spontanée à surévaluer ce qui nous arrive de fâcheux au détriment des récompenses dont nous gratifient également nos vies. À retenir davantage les mauvaises nouvelles que les bonnes.
Les expériences menées par des diverses équipes de psychologues l’ont depuis confirmé : une perte nous affecte bien davantage que le gain équivalent. Les économistes ont d’ailleurs intégré cette donnée et ils l’utilisent pour leurs prévisions.
Pour les darwiniens, l’origine de ce « biais de négativité » serait à chercher du côté de la vie difficile de nos lointains ancêtres chasseurs-cueilleurs. Ceux qui se méfiaient des baies, parfois d’ingestion mortelles, ont survécu davantage que ceux qui ne se fiaient qu’à leur goût agréable. Cet acquis s’est transmis à leurs descendants.
Aujourd’hui, alors que notre vie est infiniment plus facile et moins dangereuse, cette disposition soupçonneuse serait devenue non seulement inutile, mais nous gâcherait la vie. Nous avons la chance de vivre dans une époque bénie, de bénéficier d’avantages dont nos ancêtres n’auraient pas rêvé et nous nous croyons menacés des pires calamités. D’où des réactions inappropriées.
Compenser notre biais de négativité
C’est la thèse soutenue par les auteurs d’un livre qui vient de paraître, The Power of Bad and how to overcome it (Le pouvoir du négatif et comment le surmonter). Pour ses auteurs, l’essayiste John Tierney et le professeur de psychologie Roy F Baumeister, il nous faut prendre conscience de ce biais de négativité, afin de le compenser. Parce qu’il est omniprésent.
« Du matin au soir, nous sommes assaillis, écrivent-ils, par les marchands de malheur. Politiciens et journalistes ciblent nos émotions primaires, par un battage sur les menaces censées nous environner – qu’elles proviennent de la nature, de la technologie, des étrangers, du bord politique adverse – tout ce qui est susceptible de déclencher les circuits d’alarme de notre cerveau. »
Ainsi, le public est formidablement informé de maux aussi rares que le syndrome de stress post-traumatique, mais nullement du concept de croissance post-traumatique, qui succède à un changement personnel positif. Les psychologues ont pris conscience du problème ainsi créé. Et pour contrebalancer l’effet du « biais de négativité », ils explorent à présent un « ratio de positivité ».
Source : https://www.franceculture.fr/emissions/le-tour-du-monde-des-idees/cessons-de-voir-tout-en-noir-en-finir-avec-le-biais-de-negativite