“Avoir une faim de loup”, “mourir de faim”, “rester sur sa faim”…, les expressions, proverbes ou dictons sur la faim ne manquent pas pour illustrer au sens propre ou figuré cette notion universelle que chaque être humain est amené à ressentir à des degrés divers. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) la définit comme un « ensemble de sensations provoquées par la privation de nourriture, qui incitent l’homme ou l’animal à rechercher des aliments, et que l’ingestion de nourriture fait disparaître. »
Manger à sa faim en écoutant son corps peut aider à se sentir bien dans sa peau et à retrouver un équilibre alimentaire durable. Quelles pratiques simples sont à notre disposition pour dire adieu au grignotage et profiter de chaque bouchée de ses repas ? La faim, le plaisir et la satiété sont autant de sensations qu’il faut écouter car ce sont elles qui permettent d’adapter notre comportement alimentaire.
Comment reconnaître sa vraie faim ?
Il s’agit d’une « sensation physique que l’on ressent au creux de l’estomac » et qui est « le plus souvent passagère » indique Monique Romon, professeur de nutrition à la faculté de médecine de Lille et membre de la Société française de nutrition (SFN). En général, la sensation de faim débute après quelques heures sans manger ou après une activité physique. Cette sensation physique de crampe, non douloureuse, ou de vide dans l’estomac, est fugace et disparaît rapidement. Toutefois, c’est un signal de déficit énergétique. À noter : « On ressent moins la sensation de faim en vieillissant et lorsque l’on a des maladies inflammatoires ou des douleurs », précise le Pr Romon.
Différence entre la faim et l’envie de manger
Manger quand on a réellement faim est de loin préférable pour l’organisme plutôt qu’à satisfaire nos envies immédiates de grignotage. Dans un cas, le corps utilise ce qui lui est nécessaire énergétiquement au bon moment, tandis que manger sans faim apporte des calories que le corps va stocker inutilement et se transformer en cellules graisseuses. Notre vie organisée nous a donné l’habitude de manger à heures régulières et pas au moment ou nous avons faim et il arrive d’avoir faim alors que ce n’est pas l’heure programmée pour le repas. Il n’y a à priori aucune raison de s’imposer trois repas par jour à heures fixes, de n’en zapper aucun, de prendre un petit-déjeuner copieux et un dîner frugal ou de ne pas s’offrir un en-cas entre les repas. Savoir quand on a faim, c’est rester à l’écoute de nos besoins nutritionnels et de nos rythmes physiologiques. Nous sommes tous différents et nous n’avons pas tous les mêmes besoins nutritionnels au même moment !
La faim physique s’exprime par des gargouillis de l’estomac, une salivation, un coup de pompe qui ne s’estompe pas facilement. Alors que l’envie émotionnelle, proche de la gourmandise, est ressentie comme une urgence à compenser par la nourriture une émotion douloureuse ou un stress, mais qui peut disparaitre rapidement si notre attention fait diversion.
Stop à la diabolisation de certains aliments !
Il ne s’agit pas de se priver d’aucun aliment. Saucisson, chocolat, viennoiseries, fromage… sont l’assurance anti-craquage par excellence ! Les interdits pèsent lourds. Plus le désir est étouffé, plus nous risquons d’y succomber. Et on s’offre un super passage à l’acte : on mange n’importe quoi, sans fin et sans faim !
Arrêter de manger dès que l’on est rassasié
Les rillettes et les éclairs au chocolat ne font pas plus grossir que les légumes et le yaourt si on les mange en respectant ses sensations de faim et de rassasiement. On grossit quand on mange trop de quoi que ce soit et au-delà de ses besoins énergétiques. Les aliments très caloriques, gras ou sucrés, peuvent même nous aider à maigrir, car ils procurent une vraie satisfaction, ce qui évite de craquer pour compenser la privation.
Déguster pour manger moins, avec zéro frustration
Le plaisir gustatif diminue progressivement au cours du repas car le signal du rassasiement va de pair avec la fin du plaisir que procure le fait de manger. Arrêtez de manger avant d’être serrée à la taille, l’estomac est partiellement plein, on n’est pas encore repu mais on ressent déjà une plénitude de l’estomac qui nous dit « ça suffit » ! Ne pas se priver ne signifie pas « forfait illimité » côté quantités. Déguster, c’est l’astuce pour savourer sans faire bombance.
Déguster constitue un rempart contre les excès alimentaires. Plus on savoure, plus la satiété se ressent rapidement, et moins on a besoin d’avaler de grosses quantités. Attablé au calme, avec le plaisir visuel d’une jolie vaisselle colorée contribue à la satisfaction gustative. Le trompe-l’œil des assiettes à dessert amenuise le calibrage des parts sans en avoir l’air. On prend le temps de déguster lentement, par petites bouchées, et on se concentre sur ce que l’on ressent, les parfums, l’onctuosité, l’aspect des mets. Tout de l’assiette et de l’ambiance participe au plaisir de la dégustation. C’est un temps pour soi autant que de convivialité partagée.
En laisser dans son assiette sans en faire tout un plat
Ce qui va à la poubelle évite que notre corps soit la poubelle ! Se contraindre à finir son assiette ne résout pas les problèmes de faim de la planète. Pour aider les personnes en difficulté, faire un don à une association caritative ou donner directement est préférable car plus utile. Chaque fois que l’on refuse de se resservir, en terme de quantité, on fait trois compliments sur la qualité du plat (goût, finesse, originalité…). L’astuce des petites assiettes peut donner le change avec une assiette bien remplie, donc copieuse.
S’entraîner à laisser une part de chacun de nos plats comme une dizaine de frites, un quart de pomme, un morceau de steak pendant une semaine peut être un moyen de se frotter à ce qui angoisse et de s’en affranchir. C’est le principe des thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles. On peut stocker les restes pour le repas d’après ou du lendemain, ou faire plaisir à son animal de compagnie en lui donnant un petit extra de steak !
A la recherche du réconfort impossible
Comment se rasséréner sans engloutir des quantités pantagruéliques lorsque, ponctuellement, on se réconforte en mangeant. Car le problème n’est pas tant de se réconforter avec la nourriture que de ne pas y parvenir. On culpabilise tellement qu’on perd le réconfort que les gâteaux auraient dû nous procurer. Et on continue à manger sans fin à la recherche du réconfort qui ne vient pas.
Ai-je encore faim ? Se faire confiance
L’équilibre nutritionnel s’auto-régule sur plusieurs jours. Si on se lâche sur un repas, le corps va s’adapter : si on l’écoute bien, on aura peu faim au repas suivant, une collation sera suffisante et on ne grossira pas. Inutile donc de s’infliger une diète réparatrice.
Pour savoir si on outrepasse nos besoins, pendant sept jours, on réduit la taille de nos repas soit en supprimant l’entrée, le dessert, le pain ou le yaourt, soit en divisant par deux nos portions habituelles. Si on a encore faim, on se ressert. Le but n’est pas de s’affamer, mais de s’interroger : ai-je encore faim ? Dans les heures qui suivent le repas, qu’est-ce- que je ressens ? Si la faim ne se manifeste pas plus tôt que d’habitude, on surpasse probablement nos besoins, il faut donc réajuster nos rations.
L’équilibre alimentaire en question
Une autre bonne raison d’avoir faim provient peut-être du manque nutritionnel ou du déséquilibre de notre alimentation. Ces carences ou ces excès seraient alors ressenties par l’organisme comme des messages alarmants et traduits sous la forme d’un besoin à combler. Voilà pourquoi écouter ce que nous dit notre corps et notre estomac est un bon indicateur pour s’interroger sur la façon dont nous nous alimentons. Pourrions-nous faire moins mais mieux ? Prendre conseil, c’est faire du bien à sa santé physique et morale.